Un pays mal à l’aise avec lui-même, empêtré dans ses contradictions et qui cherche le moyen d’en sortir. C’est l’image de la France que délivre le baromètre annuel de la confiance politique, réalisé par le Centre d’études de la vie politique française (Cevipof) de Sciences Po avec l’institut Opinion Way. L’attente d’une autre vie politique semble ravivée par la crise sanitaire et économique : une écrasante majorité de Français considère que les responsables politiques ne se soucient pas d’eux, qu’ils sont déconnectés de la réalité et ne servent que leurs intérêts. Or, pas moins de 80% pensent que le vote est utile car il permet de « faire évoluer les choses ».
La solution serait donc davantage de démocratie, selon les options testées par le Cevipof. Ce système est plébiscité, il recueille un taux d’adhésion en hausse de 9 points en un an, à 84%. A contrario, l’hypothèse d’un gouvernement des experts déplait (47%, en baisse de cinq points). Signe que les médecins qui occupent beaucoup l’espace médiatique n’ont pas éveillé un désir de technocratie. Les idées alternatives restent néanmoins bien ancrées : 34% veulent « un homme fort qui n’a pas à se préoccuper du Parlement ni des élections » et 20% soutiennent un recours à l’armée pour diriger le pays.
Reste à s’entendre sur ce qu’est la démocratie. D’un côté, l’aspiration à la participation et au débat est grande. Deux Français sur trois pensent que le système fonctionnerait mieux en y associant les syndicats ou des citoyens. Seuls 16% critiquent le principe des conventions citoyennes. D’un autre côté, les attentes d’autorité contredisent cet élan, quand ce n’est pas le désir d’en découdre avec d’autres. Une majorité relative pense qu’un bon dirigeant politique « dit clairement les choses même si ça ne plait pas à tout le monde » et seuls 8% des Français considèrent que « passer des compromis pour éviter les conflits » est la marque d’un leader. La culture démocratique est bien à réinventer.
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Pour Loïc Blondiaux, grand spécialiste de la question, il faut en finir avec les faux semblants. Dans un article publié dans la revue Esprit n°473 d'avril 2021, il écrit :
" La démocratie française révèle aujourd’hui des insuffisances structurelles, qui la rendent inapte à affronter les crises écologique, sociale et sanitaire. Face à cette décomposition, il est urgent de prendre à bras-le-corps la question démocratique et de redonner sa place à la délibération."
L'article paru dans Libération le 1er janvier 2021 illustre bien cette tendance croissante à ce que l'on appelle la démocratie participative. "Autant ne pas se mentir, ça ne va pas fort du côté de la démocratie. Les scrutins se suivent et attirent de moins en moins d’électeurs. Dernières en date, les municipales de 2020 ont accusé près de 60 % d’abstention au second tour, un chiffre qui n’est pas imputable au seul contexte sanitaire. Face à un tel marasme, nombreuses sont les associations et start-up à proposer leur expertise pour réinventer la démocratie. Leurs domaines de compétence ont certes des noms bizarres (ingénierie de la concertation, intelligence collective, participation citoyenne), mais les politiques, désemparés, sont de plus en plus disposés à y faire appel. Et si des expériences comme le grand débat post-gilets jaunes ou la Convention citoyenne pour le climatsont toujours suspectes d’arrière- pensées politiciennes, il est plus facile au niveau local d’observer les fruits des innovations démocratiques."
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Et comme le relate Le Monde du 1er mai 2021 : Convention citoyenne pour le climat, collectif citoyen sur la vaccination… La démocratie participative à petits pas. Jamais les Français n’auront été autant associés au processus de décision politique, avec des résultats inégaux.
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Une définition de l'innovation sociale a été proposée par le groupe de travail « Innovation sociale » du Conseil supérieur de l’économie sociale et solidaire (CSESS) : « L’innovation sociale consiste à élaborer des réponses nouvelles à des besoins sociaux nouveaux ou mal satisfaits dans les conditions actuelles du marché et des politiques sociales, en impliquant la participation et la coopération des acteurs concernés, notamment des utilisateurs et usagers. Ces innovations concernent aussi bien le produit ou service, que le mode d’organisation, de distribution, dans des domaines comme le vieillissement, la petite enfance, le logement, la santé, la lutte contre la pauvreté, l’exclusion, les discriminations ».
Mais alors, comment définir le processus de co-construction et quels sont ses acteurs ? Apparu en 2010, le terme de « co-construction » n’a jamais autant été employé qu’aujourd’hui, mais sans qu’on sache ce qu’il recouvre réellement pour les uns et les autres. Le socio-économiste Laurent Fraisse a rédigé une étude intitulée « La co-construction de l’action publique : définition, enjeux, discours et pratiques (PDF) » en partenariat avec le Collectif des associations citoyennes, le Mouvement associatif, le Réseau national des maisons des associations, le Réseau des collectivités territoriales pour une économie solidaire et l’Union fédérale des intervenants dans le secteur culturel (Ufisc). Co-construire, c’est cogérer et co-décider avec les associations et les habitants, soit des perspectives entrant en forte résonance avec ce temps de débat généralisé issu de la crise des « gilets jaunes ».
Comme l’écrit Laurent Fraisse, la définition retenue désigne la co-construction comme « un processus institué de participation ouverte et organisée d’une pluralité d’acteurs à l’élaboration, à la mise en œuvre, au suivi et à l’évaluation de l’action publique ».
S’inscrivant dans la sociologie politique ou l’analyse des politiques publiques, la co-construction appartient au registre de la participation politique et relève des démarches de démocratie participative. Elle tente d’apporter des réponses aux limites de la démocratie représentative et au monopole des pouvoirs publics sur la définition de l’intérêt général. Elle vise à construire l’action publique au sens où celle-ci ne se réduit pas à la production des politiques publiques par le seul système politico-administratif, mais tient compte des problèmes soulevés comme des solutions proposées par les acteurs non institutionnels.
Cette définition est proche de celle proposée par Yves Vaillancourt, qui mobilise le concept de co-construction pour analyser « la participation des parties prenantes de la société civile dans la définition et l’élaboration des politiques publiques » (2015, p. 449). La définition adoptée pour l’étude s’en distingue en considérant que la co-construction ne s’arrête pas à la phase d’élaboration d’une politique publique mais inclut potentiellement sa mise en œuvre, son suivi et son évaluation. Autre différence, la co-construction intègre difficilement la co-décision, du moins dans la plupart des expériences françaises.
En résumé, comme l’écrit Madeleine Akrich, « ce terme sert à mettre en valeur l’implication d’une pluralité d’acteurs dans l’élaboration et la mise en œuvre d’un projet ou d’une action ».
Ainsi, citoyens, associations, fondations, entreprises et pouvoirs publics à l’échelle de la collectivité sont les principaux acteurs de l’innovation sociale et de la co-construction.
Même si certaines entreprises spécialisées en ont fait un véritable business, de nombreux mouvements (comme le mouvement d'idées L'avenir n'attend pas que j'ai rejoint) adoptent cette tendance lourde de la politique des années actuelles et à venir qui aiguise ses outils et se pose en rempart contre l'absentéisme et les extrémismes politiques de toute sorte.
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