Le confinement aurait sauvé 3 millions de vie en Europe et évité près de 700 000 décès en France. Comme le souligne Tristan Gaudiaut dans un article du 9 juin 2020, "Mesurer l'efficacité de l'action des pouvoirs publics est très important, à la fois pour justifier de son bien fondé dans un contexte de perte de confiance envers les institutions, mais aussi afin de pouvoir savoir ce qu'il est bon de reproduire ou non dans le futur."
Mais ce que ne mettent pas en évidence toutes ces études, c'est le désarroi des jeunes face à leur avenir, sacrifié selon certains au profit de populations plus âgées et à risque ou plus fragiles. « Mon avenir, je n’y pense pas, sinon j’explose » : l’inquiétude et la colère de la « génération Covid » face à la crise économique. Etudes, stage, CDD, entretiens… les jeunes ont vu leurs projets voler en éclats, et le chômage s’envole. Une situation qui nourrit leur sensibilité à d’autres injustices, comme le racisme et les violences policières.
Comme en témoigne Mathieu, dans un article du Monde du 13 juin 2020, lorsqu’on lui demande comment il se projette dans l’avenir, Mathis, 17 ans, éclate de rire. Mais presque aussitôt, son visage se ferme. Il pianote sur son téléphone, ailleurs.« L’avenir, cette bonne blague,marmonne-t-il. Pour moi, ça se résume à : qu’est-ce que je mange ce soir, qu’est-ce que je fais demain, comment j’évite mon père ce week-end… on ne se supporte plus. »Mi-mars, lorsque le confinement a débuté, son contrat d’apprentissage dans un restaurant du Val-de-Marne a été suspendu. « J’étais dégoûté. » L’établissement où il travaillait vient de rouvrir. Il n’y va plus.« Ils n’ont plus besoin de moi, les clients ne reviennent pas. Alors mon avenir, je n’y pense pas, sinon j’explose. »
Etudes, stage, CDD, concours, entretiens d’embauche, séjours à l’étranger : comme Mathis, des milliers de jeunes ont vu leurs projets voler en éclats à cause de la pandémie de Covid-19. Pour les 700 000 diplômés sur le point d’entrer sur le marché du travail, l’angoisse est bien plus concrète : comment décrocher un poste alors que le pays s’enfonce dans une récession annoncée, par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), comme l’une des plus brutales parmi les économies industrialisées ?
De la colère, de l’inquiétude à juste titre : les moins de 25 ans seront les principales victimes des conséquences économiques de la pandémie, s’alarme l’Organisation internationale du travail, dansson dernier rapport. Et pour cause : sur les 620 000 postes détruits durant le confinement dans l’Hexagone, selon les estimationsde l’Observatoire français des conjonctures économiques, plus de la moitié étaient des CDD et des contrats d’intérim, où les jeunes sont surreprésentés. En 2019, 54,9 % des moins de 25 ans étaient en contrat temporaire, selon Eurostat, contre 13 % des 25-49 ans.
Dans d'autres secteurs, culture, tourisme, hôtellerie, on assiste à un changement de plans pour les futurs diplômés. Alors que les étudiants de ces secteurs redoutent de grosses difficultés pour trouver un premier emploi, certains adoptent de nouvelles stratégies. En effet, les futurs diplômés de ces secteurs anticipent de graves difficultés pour trouver un emploi comme le racontent les jeunes dans Le Monde du 21 mai 2020.
Selon le quotidien du 13 juin 2020, « On a fait vivre quelque chose de terrible à la jeunesse lors du confinement,a récemment confié en privé le chef de l’Etat. On a interrompu leurs études, ils ont des angoisses sur leurs examens, leurs diplômes et leur entrée dans l’emploi. Ils trouvent dans la lutte contre le racisme un idéal, un universalisme. »
Les différentes chroniques de nombreuses personnalités sur le monde d'après sonnent comme un idéalisme décalé par rapport à la difficile réalité du déconfinement. La récession mondiale, les taux de chômage qui explosent, l'appauvrissement croissant de familles entières, les queues qui s'allongent devant les banques alimentaires, l'effondrement des bourses du monde entier et l'exacerbation des différences sociales appellent à la nécessaire construction d'un système économique plus solidaire et bienveillant et non à un retour tous azimuts au monde d'avant mais en pire ! Qui saura le construire, à l'image de Jacinda Arden, chef du gouvernement de Néo-Zélande qui en esquisse les prémices ?
"Non seulement elle a fait de sa bienveillance naturelle une arme de séduction massive, mais elle s’est révélée solide comme un roc quand une succession de crises a secoué l’archipel, d’ordinaire si paisible : de la tuerie de masse commise par un suprémaciste blanc dans deux mosquées de Christchurch, le 15 mars 2019, à l’éruption du volcan de White Island,qui a coûté la vie à 21 personnes en décembre de la même année, en passant par le nouveau coronavirus, en février. A chaque fois, son calme, sa détermination et la qualité de son leadership ont été salués." Le Monde 12 juin 2020
Gageons et espérons que d'autres personnalités similaires sauront émerger dans ce monde d'après aux contours incertains et aux perspectives difficiles à entrevoir.
Comments